Dans la carrière des plus grands champions, il y a quelques moments vraiment extraordinaires. Khaled Lakhal a évoqué avec nous ses plus belles victoires.
Lakhal, un Niçois arc-en-ciel

Dans la carrière des plus grands champions, il y a quelques moments vraiment extraordinaires. Khaled Lakhal, le grand international tunisien, a évoqué avec nous ses plus belles victoires.
Lorsque tu te retournes sur ta carrière, quel est ton meilleur souvenir ?
Sans hésitation, c'est ma victoire à l'Europétanque, en 2013. Ca se passait à cent mètres de chez moi, dans le quartier où j'ai grandi. Je suis arrivé en France à l'âge de cinq ans, et depuis je vis ici. Tous mes amis, mes voisins étaient là. C'était magnifique.
Là, tu jouais avec Richard Bettoni et Laurent N'Guyen Van, mais tu avais déjà fait beaucoup de beaux parcours lors des éditions précédentes.
Oui, j'avais fait un quart de finale en 2004 contre Eric Bartoli, et ensuite j'avais perdu quatre fois en demi-finale. Une fois avec Serge Berthet et Ludo Montoro pour la première édition, et trois fois ensuite, toujours avec Ludo, et Sebti Amri.
Et en 2013, tu gagnes face à la Dream Team.
Oui, ils m'avaient battu en demi-finale trois ans avant et là, j'ai pu prendre ma revanche. Quand ils jouent tous les trois, c'est une équipe extraordinaire. Alors, les battre en finale de mon concours préféré, c'était vraiment un grand moment.

Il y a d'autres grands souvenirs dans ta mémoire, je suppose, qui sont liés à l'équipe nationale tunisienne, dont tu as longtemps fait partie. Tu y rentres en 1995, tu n'as que vingt-six ans, et tu vas y rencontrer ceux qui sont les tauliers, à l'époque, Momo Ferjani et les frères Lakhili. Parle-moi d'eux.
Momo Ferjani, c'était un très grand joueur. Il avait un style très particulier, sans balancier mais avec un poignet exceptionnel. Il a apporté beaucoup à l'équipe de Tunisie, avec son talent et sa gentillesse. Il avait une solidité énorme : sur les boules importantes, je préférais que ce soit lui qui joue que n'importe qui d'autre. J'ai passé des moments formidables avec lui, et il me manque beaucoup aujourd'hui.
Et les frères Lakhili, ce sont des amis. Lorsque je revenais en Tunisie, c'est avec eux que je sortais. Au début Tharek m'a beaucoup aidé, notamment parce que je ne parlais pas très bien le tunisien, je comprenais quelques mots mais j'avais du mal. Il m'a pris sous son aile, il m'a mis à l'aise. On a créé des liens, on s'est soudé, et ça a donné une belle équipe.

Photo Jac Verheul
Lorsqu'on voyait jouer Tharek Lakhili, on voyait un pointeur exceptionnel, mais aussi un grand meneur d'hommes. Je me trompe ?
Non. Il était commandant de la douane, et il savait gérer les gens. Si un joueur était un peu crispé, il savait lui dire ce qu'il fallait. Surtout les jeunes, comme Sami (Atallah, NDLR), il leur apportait beaucoup. Moi, il me connaissait bien, et il ne disait rien, il savait qu'il fallait me laisser tranquille. Il avait beaucoup de psychologie.

Photo Jac Verheul
Et comment ce sont passés ces débuts en équipe nationale ?
La première année, on a perdu en quart de finale contre le pauvre Passo, Foyot et Fazzino. En 1996, on perd en finale avec Momo et Tayachi. Et en 1997, on est devenu champions du monde, les frères Lakhili et moi.
C'était face à Radnic, Miléi et Briand, qui avaient battu successivement Foyot, Passo et Farré et Quintais, Suchaud et Loy, et sans leur faire offense, c'était l'équipe de France qu'on attendait le moins en finale. Qu'est-ce que vous avez pensé quand vous avez vu que c'étaient eux ?
On les connaissait, et on savait qu'ils étaient très forts. Mais franchement, on préférait les prendre eux que Quintais et Suchaud. L'année précédente, on avait fait deux points en finale contre eux, ils nous avaient tués.
Du coup, c'est vrai, on préférait prendre cette équipe-là.

Photo Pétanque Magazine
Des championnats du monde, tu en a disputé beaucoup. Ca reste une épreuve particulière ?
Oui, très particulière. On dit que c'est plus facile qu'un championnat de France, mais j'ai fait les deux et je t'assure qu'il y a une toute autre pression sur un championnat du monde. Il y a le drapeau, on représente tout un pays, c'est fort.
Il faut absolument avoir une équipe soudée, qu'il y ait de l'amitié, pour espérer gagner quelque chose.
Depuis quelques années, la Tunisie lance dans le grand bain de nouveaux joueurs. Les résultats sont bons, mais il n'y pas encore de titres. Quel regard as-tu sur cette relève, sur ces jeunes ?
Ils sont bons. Mais ils ne jouent qu'en Tunisie, ne font pas de nationaux ou d'internationaux en France. C'est ici qu'on s'aguerrit. Même dans un simple départemental, une équipe étrangère a du mal à gagner, parce qu'ici, il y a énormément de bons joueurs.

En revanche, la Tunisie a des joueuses qui sont elles aussi, parvenues au plus haut niveau mondial. Est-ce ça te fait plaisir, est-ce que tu suis leur carrière ?
Bien sûr, elles représentent mon pays d'origine, et elles sont très fortes. Avec elles, on peut rivaliser avec les meilleures nations mondiales.

On te voit, depuis longtemps, participer aux championnats de France et y faire de beaux résultats. Je pense notamment à ces deux quarts de finale disputés en 2007 et 2013 en triplettes, et aussi à cette demi-finale perdue en 1994 face à Maubras et Prigent, aux côtés de Michel Broc. Parle-moi de ce joueur, qui a gagné le Mondial de Millau en tête-à-tête deux ans plus tard.
Michel, c'est un extra-terrestre. C'est le meilleur joueur du département. Il est très fort au point, très fort au tir, super-sympa, rigolo... A la pétanque, c'est un monstre.
Mais il préfère jouer à Nice que sortir du département, ça a un peu gâché son palmarès. Il a toujours privilégié l'amitié : c'est son choix. Mais c'est un peu dommage.

Photo Pétanque Magazine
Tu viens de reprendre le travail, et comme tout le monde, tu participes à ce déconfinement qui commence. Qu'est-ce que tu aurais envie de dire à tous ceux qui vont lire cet entretien ?
De faire très attention à eux. D'être patients. La saison est arrêtée, mais on va bientôt tous se retrouver dans de meilleures conditions, faire de belles parties de pétanque. Retrouver de la joie.

Entretien réalisé par Pierre Fieux
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